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AAH : de fortes disparités entre départements

Un rapport de la Cour des comptes pointe une différence des taux d'attribution de l'AAH entre les départements. Ce qui tient, selon elle, à « la difficulté voire l'impossibilité de dégager des critères objectifs ».

La procédure d'attribution de l'allocation adulte handicapé (AAH), dont le coût a explosé de 70 % en dix ans, manque de 'critères objectifs', est trop disparate d'un département à l'autre, et ne permet pas suffisamment de détecter d'éventuelles fraudes, pointe un rapport de la Cour des comptes.

Pour la Cour des comptes, il y a des points à revoir dans le fonctionnement de l'allocation aux adultes handicapés (AAH). D'un département à l'autre, les taux d'attribution de cette allocation aujourd'hui versée à plus de un million de personnes ne disposant pas de revenus d'activité sont très différents. Ce qui pose « un problème
d'équité territoriale et d'égal accès aux droits », insistent les magistrats financiers dans un rapport publié lundi.

Cette disparité « n'est que partiellement imputable aux caractéristiques socio-démographiques des populations », remarquent-ils. Selon eux, elle tient d'abord à « la difficulté voire l'impossibilité de dégager des critères objectifs pour caractériser la situation individuelle des demandeurs ». Depuis une loi de 2005, la situation
de handicap n'est plus seulement définie comme « une incapacité objectivable à partir d'un diagnostic médical ».

Une organisation « paradoxale »
L'hétérogénéité des taux d'attribution de l'AAH « révèle souvent des différences d'appréciation sur la portée » de cette loi et de ses textes d'application, estime la Cour des comptes. Cette allocation est aussi au « coeur de difficultés liées à la répartition des compétences entre l'Etat et les départements », selon les auteurs du rapport, qui pointent une organisation « paradoxale ». Les départements, qui ont à leur charge le revenu de solidarité activité (RSA), sont « les chefs de file de la politique du handicap ». Mais l'AAH, elle, est financée entièrement par l'Etat.
Un droit de regard « très limité »
Pour autant, celui-ci n'a qu'un droit de regard « très limité, voire inexistant » sur une dépense qui augmente de 400 millions d'euros tous les ans, souligne la Cour des comptes. L'AAH est attribuée sur décision des commissions départementales des droits et de l'autonomie des personnes handicapée (CDAPH), les dossiers étant instruits par les maisons départementales des personnes handicapées.
Dans ses recommandations, la Cour des comptes plaide pour « donner la majorité des voix à l'Etat, en CDAPH pour les décisions relatives à l'AAH ». La frontière entre le RSA et l'AAH est par ailleurs « brouillée », selon le rapport. Environ un quart des nouveaux allocataires de l'AAH étaient auparavant au RSA. « S'ajoute à ce flou, le fait que les départements [...] peuvent avoir un intérêt financier immédiat à ce que l'AAH prenne en charge leurs allocataires du RSA, dont les difficultés sociales se combinent généralement avec des difficultés d'ordre psycho-social et peuvent désormais relever du champ du handicap tel qu'il a été redéfini en 2005 », glissent les magistrats de la rue Cambon.

Un constat « sévère »
« Ce constat, selon lequel les départements, par le biais de leurs travailleurs sociaux, encourageraient des demandes d'attribution d'AAH pour limiter leurs dépenses de RSA apparaît sévère », a réagi le président de l'Assemblée des départements de France (ADF) dans sa réponse à la Cour des comptes figurant dans le rapport.
Versée sous condition de ressources, l'AAH a été revalorisée début novembre . Son montant est désormais de 900 euros par mois maximum pour une personne seule, contre 860 euros auparavant.

source : Les Echos – AFP - 26 novembre 2019 - Laurent Thévenin

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