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Ces parents dénoncent la mise à l’écart de leur enfant autiste dans son école, près de Rouen

Sid, quatre ans, souffre d’autisme. Scolarisé depuis 2018 au Mesnil-Esnard, il était, selon ses parents, laissé à l'écart des autres enfants. Il va bientôt changer d'école.

Il est l’un des premiers enfants autistes à avoir été suivi dans l’unité spécialisée dédiée à l’autisme du CHU de Rouen, où le président de la République Emmanuel Macron s’était d’ailleurs rendu en avril 2018, dans le cadre du plan autisme, prévoyant des aides financières sur cinq ans. Ce petit garçon, âgé de quatre ans, souffre d’un trouble du spectre de l’autisme (TSA), mais tous les spécialistes qui le suivent (médecins, psychologues, éducatrice spécialisée, orthophoniste)… estiment qu’il peut être scolarisé dans une école dite normale… et même qu’il est nécessaire qu’il le soit, pour son développement.

 

Sid, c’est son prénom, dispose d’ailleurs d’une auxiliaire de vie scolaire (AVS) et c’est à l’école maternelle du Mesnil-Esnard, près de Rouen (Seine-Maritime) qu’il est scolarisé, depuis 2018… sauf que tout ne s’est pas passé aussi bien que cela aurait dû, comme le racontent ses parents, qui ont remué ciel et terre pour que leur enfant et sa petite sœur jumelle Ninon (non autiste), soient changés d’établissement. Ils ont été exaucés juste avant le début des vacances scolaires de février : les jumeaux seront accueillis à la rentrée, à l’école maternelle de Franqueville-Saint-Pierre.

 

Scolarisé au début deux heures par jour

 

« Nous avions préparé la rentrée de notre fils en amont, dès le mois de juin 2017, en rencontrant la directrice, afin de lui parler de lui et l’assurer que tous les professionnels qui le suivent seraient à la disposition de l’école, pour toute question ou aide », se souvient son père Pierre-Stéphane, insistant sur le fait que son enfant n’a jamais montré de violence, ni envers lui-même, ni envers les autres.

 

Intégré au début deux heures par jour le matin, « de façon temporaire », avait-on assuré au père de famille, afin que la scolarisation se fasse doucement et par étapes, le petit garçon n’a toutefois pas vu évoluer sa place au sein de l’école.

 

« Notre fils a été laissé à l’écart avec son AVS »

 

« Cette situation a duré jusqu’au dernier trimestre et nous avons dû obliger finalement l’école à garder plus longtemps notre enfant en augmentant progressivement son temps de scolarisation après toutes les vacances scolaires », souligne Pierre-Stéphane, qui rappelle que le petit garçon est évidemment toujours accompagné de son AVS et que, de plus, une psychologue est venue, aux frais de la famille, répondre aux questions et proposer des solutions, pour permettre à l’enfant « d’avancer dans ses apprentissages scolaires ».

 

Toutefois, les parents du petit écolier n’ont pu dresser un bilan catastrophique de cette première année… avec une deuxième année et un changement d’enseignement qui n’ont rien changé à la situation, même si l’enfant était accepté  depuis quelque temps une matinée entière en classe :

 

« Notre fils a été laissé à l’écart avec son AVS. Il n’a pas pris part aux activités des autres enfants, n’a fait aucun travail d’apprentissage comme apprendre à reconnaître les lettres de son prénom, car aucune activité n’était préparée pour l’AVS », déplore le père du petit garçon.

 

Pire, l’enfant aurait pris conscience de plus en plus de la situation. « Il était en souffrance et pleurait sur le chemin de l’école le matin et ne retrouvait un peu de sérénité qu’en voyant son AVS », confie avec peine sa maman Camille, scandalisée par cette situation, mais également par le fait de cette souffrance subie par leur enfant.

 

Un enfant qui fonctionne différemment

 

Pourtant, l’enfant fait des progrès, grâce aux efforts déployés par ses parents, dans le cercle familial et avec les professionnels qui le suivent. « L’école n’a jamais voulu entrer dans cette dynamique en acceptant de modifier un peu sa méthode. Notre fils a autant de capacités qu’un autre, seulement, il fonctionne différemment », plaident ses parents.

 

« Nous avons rencontré l’inspectrice académique de secteur ainsi que son supérieur hiérarchique. Nous leur avons fourni des certificats médicaux, notamment du neuro-pédiatre du CHU, expliquant qu’une scolarité en milieu ordinaire était adaptée et même souhaitable pour notre fils », indiquent les parents qui, en perte de confiance avec l’école actuelle de leurs enfants, ont demandé à ce qu’ils soient scolarisés dans un autre établissement. Mais là encore, ils racontent que cela s’est avéré un vrai parcours du combattant pour trouver une autre école. En désespoir de cause, ils ont fait appel à un avocat, mais même ce dernier n’a reçu aucune réponse à ses demandes.

 

« C’est scandaleux, c’est de la discrimination »

 

L’avocat de la famille Me Cherrier, ne mâche pas ses mots. Pour lui, cette situation est scandaleuse. « On a là un môme laissé dans un coin avec un instituteur qui refuse de s’en occuper. Il y avait un vrai blocage dans une école qui a pourtant un rôle pédagogique à jouer », lance l’avocat, qui a contacté à plusieurs reprises l’Inspection académique, pour sortir de l’impasse, mais qui n’a reçu aucune réponse à ses courriers.

 

« Tout ce que les parents demandent, c’est un changement d’école. Il suffirait juste d’un peu de bonne volonté. Mais nous sommes pieds et poings liés avec le bon vouloir de l’académie, qui n’a répondu à aucun des trois courriers que j’ai adressés en recommandé », dénonçait il y a quelques jours encore Me Cherrier, avant que finalement, la situation se débloque samedi 9 février.

 

Pour autant, l’avocat estime que cette situation relève de « la discrimination » et il rappelle l’existence de principes fondamentaux : « L’inclusion et l’intégration du handicap à l’école. » Très engagé pour défendre les enfants atteints de handicap et notamment souffrant d’autisme, Me Cherrier constate que malheureusement, il reste encore beaucoup à faire pour intégrer les enfants concernés. « J’ai eu l’occasion de défendre un enfant autiste, alors âgé de huit ans : à quatre reprises on a tenté de le sortir du système scolaire. J’ai plaidé à chaque fois… Aujourd’hui, il a 18 ans et il a le Bac », conclut l’avocat, comme pour montrer que l’essentiel est d’intégrer les enfants dès le plus jeune âge.

 

Du côté de la mairie du Mesnil-Esnard, Évelyne Cocagne, adjointe aux affaires scolaires assure comprendre tout à fait la demande des parents et d’ailleurs, elle affirme qu’il n’y a « aucun souci pour elle », pour accorder cette dérogation.

 

Rappelons, en effet, que ce sont les mairies, qui procèdent aux inscriptions des enfants dans les écoles. « Nous sommes plutôt souples ici et on pense à l’intérêt des enfants. Maintenant, il faut trouver une solution pour sortir de cette solution de blocage et trouver une autre école. Il ne faut pas oublier qu’il y a deux enfants derrière tout cela », s’inquiète l’élue.

 

L’appel à l’opinion publique…

 

Finalement, il y a quelques semaines, les deux parents avaient décidé de s’exprimer via les réseaux sociaux, pour alerter l’opinion et tenter de faire bouger les choses. « Nous en étions  là, nous ne savions plus quoi faire pour avancer », confient les parents du petit garçon autiste, dont ils ont l’impression qu’on oublie totalement la souffrance et le droit à recevoir un enseignement, comme n’importe quel autre enfant. En parallèle de cet appel à l’aide, les parents du petit écolier avaient également avisé les élus du secteur, en espérant qu’ils puissent de leur côté, tirer la sonnette d’alarme…

 

Et samedi 9 février, la bonne nouvelle est arrivée : la commune de Franqueville-Saint-Pierre a accepté de scolariser Sid et sa sœur Ninon, dès le retour des vacances de février, à l’école maternelle.

 

Changement au retour des vacances

 

Une annonce confirmée à la rédaction par le maire Philippe Leroy. « J’ai été contacté par l’Inspection académique et j’ai pris contact avec les parents. C’était essentiel de rendre ce service à la famille. Les choses vont se faire en douceur, au retour des vacances », confie le maire de Franqueville-Saint-Pierre.

 

La Ville du Mesnil-Esnard, de son côté, a souhaité également faciliter les choses en ne s’opposant pas à la demande de dérogation de la famille, ainsi que l’a expliqué l’adjointe aux affaires scolaires Evelyne Cocagne : « On s’arrange toujours sur le plateau », constate l’élue, soucieuse du bien-être des enfants.

 

Un soulagement évident pour les parents, qui ont toutefois souhaité apporter ce témoignage, pour rappeler combien l’inclusion des enfants souffrant de handicap est essentielle. 

 

Contactés par la rédaction, les services du rectorat n’ont pas été en mesure de nous mettre en relation avec un interlocuteur au fait de ce dossier, pour clarifier la situation. La directrice de l’école du Mesnil-Esnard n’a pas souhaité s’exprimer sur le sujet. Toutefois, le service communication explique que dans des cas comme cette famille du Mesnil-Esnard, l’Inspection académique préconise en tout premier lieu une rencontre avec le responsable de l’établissement et l’inspecteur de secteur pour évoquer la situation de l’enfant. La famille peut également saisir le pôle ASH (Adaptation et scolarisation des élèves en situation de handicap) de son département.

 

Notons encore que des classes ULIS, à savoir des unités localisées pour l’inclusion scolaire, existent, mais que dans le cas présent, les parents de Sid ont mis en avant le fait que les professionnels qui suivent leur enfant ont préconisé qu’il soit scolarisé dans des classes traditionnelles.

Actu.fr 76 - Mesnil-Esnard - 15 février 2019

 

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